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Big Brother is Watching You… and it’s Legal

17 septembre 2019
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Le 4 septembre dernier, le New York Times et le Financial Times rapportaient les conclusions d’une décision rendue par la High Court of Justice d’Angleterre, laquelle statue sur la légalité de l’usage des systèmes de caméra à reconnaissance faciale en direct par les autorités gouvernementales. Suivant les dires du Tribunal, il s’agirait de la première décision de ce genre au monde[1]. Le Commissaire anglais à la biométrie a par la suite publié une réponse à cette décision en date du 10 septembre dernier.

Le demandeur plaide une violation à ses droits fondamentaux alors qu’il aurait été filmé dans un lieu public à au moins deux reprises sans sa permission par des caméras munies d’une technologie permettant une reconnaissance faciale en direct. Selon le demandeur, cette pratique atteint les droits de la personne en ce qu’elle s’assimile à un prélèvement d’ADN ou d’empreintes digitales sans en obtenir le consentement préalable de la personne concernée :

Mr Bridges had claimed there were at present no proper legal safeguards governing the use of automated facial recognition technology, which compares biometric data of individuals to a police database. He also alleged it was akin to taking someone’s DNA or fingerprints without their consent, and said the deployment of facial recognition technology could affect the human rights of thousands of people.[2]

Le Commissaire anglais à la biométrie réfère également à ces deux procédés en les qualifiant, aux côtés de la reconnaissance faciale au coeur du litige, d’intrusion dans la vie privée et la liberté d’un individu :

Just like DNA and fingerprints, all such systems are an intrusion into an individual’s privacy and potentially into their liberty and therefore it is not surprising that groups such as Liberty and Big Brother Watch have challenged its legality or called for its banning.[3]

Ceci étant, la Cour précise qu’un contrôle légal suffisant est effectué par les forces policières pour prévenir un usage inapproprié de la technologie. L’on notera notamment le procédé de « deletion of data unless it concerned a person identified from the watch list.[4] » La suppression des données relatives à la reconnaissance faciale se ferait alors dans les 24 heures suivant l’enregistrement.[5] Ainsi, la Cour est d’avis que les autorités respectent les normes applicables en matière de vie privée dans l’utilisation qu’ils font de ce nouveau système.

Nécessité d’une innovation

Cette innovation des méthodes policières s’inscrit dans une série de coupures budgétaires à South Wales qui complique la tâche des policiers d’assurer la sécurité des citoyens :

“Preventing crime and supporting safe, confident, resilient communities is the first responsibility of the police, but this has become increasingly difficult” in the face of budget cuts, Mr. Michael said in a statement. “That has made it essential to use innovation and embrace technology like facial recognition if we are to have any hope of maintaining police numbers in our local communities.”

Quoi qu’il en soit, le demandeur promet de faire appel de la décision qui, selon lui, autorise l’utilisation d’une technologie qui brime le droit des citoyens à la vie privée en permettant une « disproportionate government surveillance[6] ». Il est clair que selon lui, l’on ne peut se résoudre à avoir recours à ces procédés par manque d’effectif.

Utilisation courante

Ce litige révèle une utilisation plus large de ce genre de caméras par les autorités policières que celle à laquelle l’on peut s’attendre :

In Britain, the technology has been used by the South Wales Police and the Metropolitan Police Service in London. In the United States, at least five large police departments — including those in Chicago, Dallas and Los Angeles — have claimed to have run real-time facial recognition, purchased technology that can do so or expressed an interest in buying it, according to a Georgetown University study from 2016.

The South Wales Police often use live facial recognition at large events, such as the national air show and rugby matches, according to police records. The cameras scan faces in a crowd, comparing the imagines with a police database of wanted individuals. When the system finds a match, it sends an alert to officers in a command center, who then contact other officers to stop the person.[7]

Le Financial Times rapporte que cette technologie serait également utilisée par le service de police de Leicestershire, troisième corps policier britannique à y avoir recours. L’article ajoute même que Londres, l’une des trois villes visées par la surveillance par caméra à reconnaissance faciale automatique en temps réel, serait vue comme la seconde ville la plus surveillée au monde après Beijing.[8] Cette nouvelle technologie n’aide en rien la réputation de la capitale anglaise.

L’importance des faits de l’espèce

Commentant la décision, une avocate anglaise insiste sur l’importance des faits dans la décision rendue :

Fiona Barton QC, a barrister at 5 Essex Court, cautioned that the ruling was fact specific. “This case should not be taken as a green light to go ahead with the use of AFR [automated facial recognition] in all and any circumstances: it was decided on specific facts, within a specific legal framework applicable for certain public authorities and by reference to South Wales Police’s policy and other documents.”[9]

Le Commissaire anglais à la biométrie souligne ce même point :

The judgment itself considers solely the use of AFR by the police rather than any other public or indeed private bodies. Moreover, the judgment is specific to the particular circumstances in which South Wales Police used their AFR system.[10]

Conclusion

À la lumière de ces commentaires, il semble que la portée de la décision de la High Court of Justice soit quelque peu limitée, s’inscrivant dans un cadre factuel trop précis pour en tirer des principes généraux d’application. Cependant, un arrêt de la Cour suprême du Royaume-Uni dans ce dossier, si tant est qu’un tel arrêt soit rendu, permettrait certainement de paver le chemin aux autres tribunaux saisis de dossiers similaires ainsi qu’au législateur qui devra, tôt ou tard, encadrer la question. Il s’agit d’ailleurs du point central que soulève ce litige selon le Commissaire anglais à la biométrie :

The bigger question going forward is whether there should be a specific legal framework for the police (and others) to routinely deploy new biometrics including AFR but also voice recognition, gait analysis, iris analysis or other new biometric technologies as they emerge. The judgment in this case does not provide the answer to this, which is, in my view, for Ministers and Parliament to decide.[11]

Ce dossier est donc à suivre, non seulement en ce qui concerne les procédures d’appel, mais également pour ce qui est d’une éventuelle intervention du législateur britannique.


[1]   R -v- The Chief Constable of South Wales Police and others, [2019] EWHC 2341 par. 1, tel que rapporté par Jane Croft, Madhumita Murgia, « UK court backs Welsh police use of facial recognition technology », Financial Times, 4 septembre 2019, en ligne : https://www.ft.com/content/92d7d5f0-cefb-11e9-99a4-b5ded7a7fe3f (consulté le 15 septembre 2019) et Biometrics Commissioner, Automated facial recognition, 2019, en ligne : https://www.gov.uk/government/news/automated-facial-recognition (consulté le 15 septembre 2019).

[2]   J. Croft, M. Murgia, « UK court backs Welsh police use of facial recognition technology », préc., note 1.

[3]   Biometrics Commissioner, Automated facial recognition, préc., note 1.

[4]  Adam Satariano, « Police Use of Facial Recognition Is Accepted by British Court », The New York Times, 4 septembre 2019, en ligne : https://www.nytimes.com/2019/09/04/business/facial-recognition-uk-court.html (consulté le 15 septembre 2019).

[5]   J. Croft, M. Murgia, « UK court backs Welsh police use of facial recognition technology », préc., note 1.

[6]   A. Satariano, « Police Use of Facial Recognition Is Accepted by British Court », préc., note 4.

[7]   Id.

[8]   J. Croft, M. Murgia, « UK court backs Welsh police use of facial recognition technology », préc., note 1. Voir également : Biometrics Commissioner, Automated facial recognition, préc., note 1.

[9]   J. Croft, M. Murgia, « UK court backs Welsh police use of facial recognition technology », préc., note 1.

[10] Biometrics Commissioner, Automated facial recognition, préc., note 1.

[11] Id.

Commentaires

1 commentaires pour “Big Brother is Watching You… and it’s Legal”

Mac

24 septembre 2019 à 1 h 22 min

Très intéressant! Une intervention du législateur est effectivement nécessaire et j’irais même jusqu’à dire que l’absence d’une telle intervention constitue une atteinte au droit à la sécurité des citoyens.

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