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Steam et la loi australienne sur la protection des consommateurs

5 décembre 2016
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Le 15 novembre 2016, lors d’une audience dans le cadre du litige opposant de longue date la société Valve et l’ACCC (Australian Competition and Consumer Commission), cette dernière a réclamé à la société américaine une amende de $3 millions de dollars (australiens).

Valve est une société de développement de jeux-vidéos mais c’est également elle qui va mettre en place la plateforme Steam, plateforme qui permet essentiellement l’achat en ligne de jeux. Le litige opposant depuis longtemps la société américaine à la commission australienne concerne la politique de remboursement des jeux défectueux que Steam a mené entre 2011 et 2014.

L’arrêt de la cour fédérale d’Australie du 24 mars 2016

En août 2014, la ACCC va introduire une action contre Valve considérant que celle-ci a violé la loi australienne sur la consommation et plus précisément les article 18, 1 et 29, 1, m de cette loi. Celle-ci prévoit que, lors de la vente d’un bien à un consommateur, ce dernier a droit à certaines garanties et, parmi ces garanties, on trouve le droit à ce que le bien ne soit pas défectueux (article 54). Si c’est le cas, le consommateur peut obtenir le remboursement, la réparation ou le remplacement du bien en question (article 259 et 263). L’article 64 de cette même loi prévoit que ces garanties ne peuvent pas être réduites ou modifiées.

Or, entre 2011 et 2014, Steam ne permettait pas d’obtenir le remboursement d’un jeu dans le cas où celui-ci serait défectueux. Il était possible pour les consommateurs de s’adresser au service clients mais ils n’avaient aucune certitude quant à la décision qui serait prise.

La Cour fédérale d’Australie va être saisie du problème et, au terme d’une très longue procédure, va condamner Steam. Dans le cadre de ce litige, le juge a été amené à se demander si un jeu dématérialisé pouvait être considéré comme une « marchandise » au sens de la loi. Steam va invoquer le fait que la fourniture d’un bien au moyen d’une licence ne constitue pas une fourniture de marchandise. Mais cet argument va être rejeté par le juge. D’abord, celui-ci relève le fait que la loi sur la consommation donne une définition très large de la notion de « fourniture de marchandises ». Aussi, il va estimer que si on faisait une distinction entre les deux, ça mènerait à une application illogique de la loi. Finalement, le juge va arriver à la conclusion que la fourniture de logiciels constitue bien une fourniture de marchandises au sens de la loi. Il faut donc appliquer les garanties prévues par celle-ci à des éléments dématérialisés.

« Although not everything Valve supplied was a good, the important point for the purposes of this case is that at the core of Steam’s supply to its subscribers was the provision of games. And at the heart of the provision of games was the supply of computer software. »

Mais l’affaire n’est pas terminée. En effet, la ACCC réclame maintenant $3 millions de dollars à la société américaine en raison de cette condamnation.

Et maintenant ?

Le 2 juin 2015, Valve annonçait un changement dans la politique de Steam en matière de remboursement. En effet, il est désormais possible d’obtenir automatiquement un remboursement de pratiquement tous les articles achetés sur la plateforme si la demande est faite dans les 14 jours suivant l’achat et que le consommateur n’a pas utilisé le jeu plus de deux heures. Le consommateur est donc beaucoup plus protégé vu que le remboursement est pratiquement automatique.

Mais maintenant ce sont les développeurs de jeux qui grincent des dents. En effet, tous les jeux proposés sur Steam n’ont pas un gros budget et ne proposent pas des dizaines d’heure de jeux. Certains, et ils sont nombreux, ont un budget beaucoup plus limité et propose une expérience beaucoup plus courte. Pour ces jeux-là, deux heures peuvent être tout à fait suffisantes pour terminer le jeu ou presque et ensuite demander le remboursement. Le consommateur pourra dans ce cas-là en bénéficier gratuitement ce qui pose problème au développeur. En voulant mettre en place une politique de protection des consommateurs, Steam va porter atteinte aux petits créateurs, ne permettant qu’à un certain type de jeux, les jeux à gros budget, de survivre sur la plateforme.

Entre la protection des consommateurs et celle des créateurs indépendants, où se trouve l’équilibre ?

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