Aussi simple que de commander un hamburger, une paire de chaussures ou un livre, une personne peut commander les services sexuels d’une belle fille âgée entre 13 et 16 ans sur la Internet. Vingt filles exploitées équivalent à 6,5 millions de dollars récoltés par un proxénète annuellement. Le répudiant et rentable commerce sexuel des mineurs au Québec est devenu un « produit » d’exportation canadien.
Les services sexuels d’une seule fille peuvent représenter jusqu’à 300.000$ annuels pour un proxénète, l’équivalent de 6,5 millions annuels pour 20 filles exploitées. Selon l’inspecteur de police de la Ville de Montréal, M. Patrice Carrier, l’exploitation sexuelle est l’activité criminelle le plus profitable du Canada après le trafic de drogues.
Majoritairement constitué de jeunes filles provennant de la classe moyenne, de bonnes familles unies, d’écoles privées, et autres, certaines d’entre-elles sont malheureusement tentées par l’argent « facile » et rapide qu’offre la prostitution. Dans d’autres cas, elles cumulent des environnements familiaux instables, foyers brisés, dysfonctionnels et des problèmes économiques. Dans les deux cas, elles sont souvent des proies faciles pour les proxénètes qui prennent le contrôle sur elles en les éloignant de leur endroit d’origine. Elles sont belles, jeunes, mais également vulnérables. Une fois sous le contrôle des proxénètes, elles deviennent très vite dépendantes psychologiquement et économiquement.
D’après le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), en 2015, 1800 cas de disparitions de jeunes filles mineures été enregistrés et près de 1300 de ces filles provenaient des centres jeunesse. Toujours en 2015, il y a eu 200 dossiers de proxénétisme et 23 hommes accusés, dont la moitié inculpés d’exploitation sexuelle des mineures. « Le Québec est la seule province canadienne qui exporte des jeunes filles ailleurs au pays pour qu’elles y soient exploitées sexuellement. » a déclaré M. Carrier. Il existe notamment deux sources de revenus importantes pour les proxénètes : Les revenus provenant de la vente des services sexuelles de ses victimes sur Internet, dans les bars ou dans les hôtels, et les revenus générés par la vente des ces filles (traite des personnes) à prix très bas dans les autres provinces, notamment dans l’ouest du Canada.
Internet, avec les réseaux sociaux, constitue une des plateformes de recrutement des filles mineures préférée pour les proxénètes. Ensuite, elles sont obligées par ces derniers, d’annoncer leurs services sexuels sur les sites Web tel que les petites annonces où les clients peuvent commander une fille de manière anonyme afin d’arranger une rencontre. Tel est le cas du site américain backpage.com considéré comme le chef de file pour le commerce du sexe en Amérique du Nord. Il permet la commercialisation des produits et des services, avec une section « adult » qui se conforme apparemment à loi, en demandant l’âge de la majorité pour accéder au site et qui affiche un lien pour rapporter l’exploitation des mineurs ou la traite des personnes.
Aux États-Unis, depuis deux ans déjà que le Sénat demande que le site backpage.com ferme sa section « adult » et convoque le PDG afin de s’expliquer. Néanmoins, il ne s’est jamais présenté et la section continue tout en rapportant des profits millionnaires. De plus, deux jeunes filles de 15 ans qui ont réussi à se sortir du sinistre business, ont déclaré avoir été vendu sur le site et ont dénoncé le lucratif modèle d’affaires d’exploitation sexuelle juvénile du site. « À Toronto, sur les 350 dossiers de jeunes filles disparues, toutes les victimes étaient vendues sur des petites annonces de ce site. » Face aux pressions sur le sujet, les compagnies de carte de crédit ont brisé leurs liens avec le site web.
Au Canada, le proxénétisme de mineurs, l’achat de services sexuels et la publicité de ces services sont interdites et criminalisés par le Code criminel. Le projet de loi C-36, entrée en vigueur en décembre 2014, est venu instaurer la Loi sur la protection des collectivités et des personnes victimes d’exploitation qui modifie certains articles du Code criminel en lien avec la prostitution. Il a entres-autres abrogé l’article 212 du Code criminel et ajoutés certains articles tel que nouvel, article 286.3(2) qui considère coupable d’un acte criminel de proxénétisme d’un mineur
« […] quiconque amène une personne âgée de moins de dix-huit ans à offrir ou à rendre des services sexuels moyennant rétribution ou, en vue de faciliter une infraction visée au paragraphe 286.1(2), recrute, détient, cache ou héberge une telle personne qui offre ou rend de tels services moyennant rétribution, ou exerce un contrôle, une direction ou une influence sur les mouvements d’une telle personne. »
L’infraction est passible d’un emprisonnement minimal de 5 ans et maximal de 14 ans. De même, le projet de loi C-36 a également ajouté un article concernant l’achat de services sexuels entre adultes et des personnes mineures. L’article 286.1 (2) impose aux clients, une peine d’emprisonnement minimale d’un an dans le cas d’une récidive et une peine maximal de 10 ans. Au sens de la loi, les prostituées ne sont pas passibles des sanctions criminelles puisqu’elles sont considérées comme des victimes d’exploitation sexuelle qui ont besoin de soutien pour quitter le milieu de la prostitution.
Au niveau de la publicité de services sexuels, le nouvel article 286.4 du Code criminel, stipule que « quiconque fait sciemment de la publicité […] (document écrit, photo, vidéo, etc.) […] pour offrir des services sexuels moyennant rétribution est coupable :
- a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans;
- b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire passible d’un emprisonnement maximal de dix-huit mois. »
Cependant, l’ article 286.5 du Code, prévoit qu’une personne qui fait la publicité de la vente de ses propres services sexuels ne peut être déclarée coupable. Ainsi, la loi permet de porter des accusations contre les diffuseurs de telles annonces. De plus, les articles 164 et 164.1 donnent la faculté au juge d’ordonner la saisie et la suppression de tout matériel publicitaire offrant des services sexuels.
En 2012, l’ex-députée fédérale, Mme. Maria Mourani, a déposé avait déposé le projet de loi C-452 qui fut adopté à l’unanimité et reçu la sanction royale en juin 2015. Le projet modifia les articles 212 et 279 du Code criminel sur l’exploitation et la traite de personnes, qui ne traitaient pas de la traite à des fins sexuelles selon Mme. Mourani.
Le Québec a lancé au début de cette année un programme avec un budget de 3 millions de dollars sur cinq ans intitulé « prévention jeunesse » afin de lutter contre l’exploitation sexuelle des mineurs. Le ministre de la Sécurité publique, M. Martin Coiteux, garde le silence sur la publicité des services sexuels qui s’affiche encore sur Internet sous prétexte que la loi relève de la juridiction fédérale. Ainsi, le Premier ministre du Canada M. Justin Trudeau, lors de sa campagne électorale, a promis de modifier la Loi sur la protection des collectivités et des personnes victimes d’exploitation apporter par le projet de loi C-36. Reste à voir si cela se fera…